7 Février 2014
Iquitos, la principale ville de l'Amazonie péruvienne, est le plus important port fluvial du pays. On ne peut arriver à Iquitos que par la voie aérienne ou fluviale.
En 1880, les gringos arrivent en masse pour exploiter le caoutchouc, ceci durera 30 ans. J'ai pu voir une exposition de photos de cette période, avec l'esclavagisme des indigènes natifs de la région pour travailler au service des occidentaux. Il a fallu attendre 1940 pour qu'on interdise d'acheter un indien. La méthode d'exploitation a été un désastre et aujourd'hui les hévéas ont disparu, les ressources ont été épuisées.
Aujourd'hui c'est l'exploitation pétrolière qui domine, provoquant pollution des ressources naturelles et polémiques.
Les peuples du bassin amazonien subissent de fortes pressions de la part des compagnies pétrolières, des entreprises de déforestation, des narco-trafiquants et des missionnaires.
La température moyenne à Iquitos est de 30°C.
La ville possède toujours des preuves de la richesse crée vers 1880. Les maisons aussi bien près de la place centrale que près de la rivière sont toujours recouvertes des tuiles importées du Portugal avec d'autres produits de luxe européens.
A quelques rues de la place des armes, en direction de la rivière se trouve Belen, le quartier flottant d' Iquitos. Presque aussi intéressant que la jungle elle-même, Belen est le centre d' une incroyable variété de produits de l' Amazone, des fruits tropicaux, des poissons de toutes tailles et formes, des tortues, oiseaux, grenouilles et plantes médicinales.
Suri : c’est une larve dodue de scarabée, très présente en Amazonie, qui se nourrit de l’intérieur des palmiers. Riches en protéines, minéraux et vitamines A et E, la suri se mange frite ou grillée.
Et oui j'ai goûté ! Bof bof car c'est plein d'huile, on le mange puis on croque dans un morceau de banane pour faire passer le côté très très gras...
A Iquitos, je trouve une chambre bon marché à la Casa del Francés. Je discute avec le gérant et il me parle d'un chaman (très bien et pas piège-à-touristes) chez qui on peut séjourner pour faire une diète, connaître les plantes environnantes et participer à des cérémonies d'ayahuasca. Ça me paraît très intéressant, donc nous l'appelons. Je pars le lendemain pour passer une semaine chez ce chaman, Don Luis.
Pour s'y rendre ce sont vingt minutes de barque, puis vingt minutes de moto-taxi et enfin vingt minutes de marche dans la jungle.
Pendant sept jours j'ai séjourné dans un tumbo, une petite maloca, seule au milieu de la jungle, à écouter le bruit impressionnant de la selva, en particulier la nuit. En effet la forêt est peuplée d'insectes en toutes tailles et tous genres, de singes, d'une très grande variété d'oiseaux, de crapauds.
Chaque matin je devais boire une décoction de Chuchuwasi à jeun. Cette plante est connue depuis des millénaires par les indigènes pour ses nombreuses vertus médicinales en grandes parties validées aujourd'hui. Parmi les plus importantes on trouve : anti-inflammatoire, contre l'arthrite et les rhumatismes, anti-diarrhéique, tonique général, régulateur du cycle menstruel féminin et aphrodisiaque. Il est aussi très souvent utilisé pour traiter et prévenir des coups de froid, des états grippaux et bronchites.
Puis vers 10h, on m'apportait un premier repas, uniquement des légumes et sans sel. Puis un second repas vers 17h, toujours des légumes sans sel. J'ai suivi ce régime durant tout mon séjour (j'ai perdu quelques kilos, que j'ai bien rattrapé ensuite...).
Et que faisais-je entre temps, et bien lecture, méditation, observation des tous petits singes qui habitaient dans l'arbre à côté de mon tumbo, bouchage des trous de la moustiquaire, bain dans la rivière...
Et participation aux cérémonies d'ayahuasca. J'ai fait trois cérémonies, une à l'arrivée - qui a permis au chaman de m'observer et de me prescrire une plante particulière, en l'occurence le chuchuwasi -, une au milieu de la semaine et la dernière à la fin de ma diète. Ces cérémonies servent à équilibrer le corps et l'esprit, en complément du travail entamé avec le chuchuwasi et la diète. Le chaman chante des icaros, qui orientent et dirigent l'action de la plante.
Alors au sujet de l'ayahuasca, je vais me répéter mais je me dois de stopper la circulation de l'intox à ce sujet :
- le plus important est de rencontrer un VRAI et bon chaman, car la région d'Iquitos est pleine de chamans plus ou moins fréquentables, il existe aussi des endroits très commerciaux, pièges à touristes occidentaux qui viennent là juste pour se faire un trip ;
Un bon chaman est un médecin, un curandero, utilisant les plantes pour soigner, ce n'est pas un type tout-nu avec des plumes sur la tête qui se fait passer pour un chaman pour soutirer de l'argent aux gringos !
- oui l'ayahuasca est inscrite sur la liste des stupéfiants en France (pour le bonheur des agences qui vendent des initiations à l'ayahuasca, les fameux pièges à touristes...), alors que cette plante aide à traiter notamment l'alcoolisme (l'alcool, lui n'est pas sur la liste des stupéfiants en France).Il existe d'ailleurs un centre au Pérou dirigé par un médecin FRANCAIS qui traite les alcooliques et drogués par l'ayahuasca, la majorité occidentaux... quelle ironie !
Avis de scientifiques sur l'interdiction de l'ayahuasca en France :
Pour Annick Darley et Frédérick Bois-Mariage, qui ont rédigé une thèse sur l'ayahuasca, "tout chercheur connaissant bien la littérature scientifique sur l'ayahuasca, ses composants et ayant une expérience de terrain ne peut que conclure qu'il s'agit d'une décision fondée sur d'autres critères que l'objectivité scientifique et obéissant à des mobiles autres que la protection de la santé publique".
- deux des alcaloïdes principaux de la préparation d'ayahuasca sont naturellement présents dans le corps humain ;
- et enfin, s'il vous plaît, ne m'envoyez pas ce lien vers un article bidon d'un type qui aurait fait un mauvais voyage avec l'ayahuasca et aurait été sauvé par Jésus Christ...
Et vous allez me dire, mais à quoi ça sert tout ça ? Et bien voici une explication donnée par Jan Kounen qui est parfaite :
"La medicina va vous balader sur les positions extrêmes de vos curseurs émotionnels et sentimentaux, mémoriels et cognitifs. La totale, quoi. Pourquoi ? Pour votre bien.
Je m’explique. Si l’expérience de terreur est virtuelle, c’est-à-dire qu’elle n’est pas en rapport direct avec un vrai danger mortel, la connaissance de cet état vous permettra de mieux dompter cette émotion si vous devez y faire face à nouveau.
L’extase… La dompter et apprendre à la laisser filer, à ne pas la saisir. Et ainsi ne pas être saisi à votre tour par la souffrance, la déception, la tristesse et la confusion au rendez-vous de la projection mentale générée lors de votre extase, ou simplement au moment de sa disparition.
Plonger dans ses émotions négatives, c’est aussi un moyen de les expurger dans une catharsis. Le positif aura fructifié et sera ancré. En apprenant à naviguer dans certains états émotionnels, nous serons moins submergés à l’avenir et deviendrons une bestiole plus consciente de ce qu’elle est et de ce qu’elle vit. Donc, curseur à fond des deux côtés pour élargir le spectre de la connaissance de soi. Le spectre large, c’est quitter les peurs de l’enfance et retrouver la joie pure connue à cette période et parfois oubliée."
A mon retour à Iquitos, entre autres balades, je visite le seul musée de la ville et je vais voir un refuge d'animaux.
Visite d'une communauté "fausse" car aujourd'hui ils sont tous en jeans, t-shirt, ont l'écran plat dans la maloca...